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A quoi cela sert ?
2 février 2017

La musique mystique

A-t-on fait de la musique mystique? Je n'ose trop l'affirmer; en tout cas, on n'a pu s'y prendre autrement que pour l'extase. Schumann a mis en musique des scènes du Faust de Gœthe; il a développé particulièrement la scène finale, véritable débauche poétique, mystique et allégorique. On y voit Pater extaticus (probablement St-Antoine d'Egypte), planant en l'air, tantôt en haut et tantôt en bas, Pater seraphicus (St-François d'Assise) dans la région intermédiaire, Pater profondus (St-Bernard de Clairvaux) dans la région profonde, Doctor Marianus (Duns Scott) ravi en extase, Mater gloriosa (la Madone), la grande Pécheresse (Marie-Magdeleine), la Samaritaine (Évangile selon St-Jean, chap. IV), Marie l'Egyptienne (personnage de la légende), Marguerite, un 132 chœur d'anachorètes, un chœur de pénitentes, un chœur d'enfants mâles bienheureux, le chœur des jeunes anges, le chœur des anges portant l'âme immortelle de Faust, enfin un chœur d'anges accomplis. Les enfants dont il est question, sont morts quelques instants après leur naissance; ils n'ont pas connu la misère de la terre; c'est pour cela que le poète les appelle les enfants de minuit, la croyance populaire attribuant une destinée heureuse aux enfants qui naissaient à cette heure. Pater seraphicus les prend et les loge dans son cerveau, pour leur faire voir par ses propres organes ce monde qu'ils n'ont pas eu le temps de connaître; puis il leur donne la volée: conception bizarre que Gœthe a empruntée aux visions de Swedenborg, comme Berlioz y a pris le charabia des démons. Le tout se termine par le Chorus mysticus célébrant l'Eternel-Féminin. Rien dans la musique de Schumann n'indique qu'il y a des personnages surnaturels ou symboliques. Mater gloriosa dit quelques 133 mots seulement, qu'elle psalmodie sur des notes répétées, comme fait ensuite aussi le Docteur Marianus. La progression harmonique qui soutient les parties vocales en cet endroit est d'un bel effet, mais sans rien de mystique. Bref, le style de Schumann est le même dans tout l'ouvrage, que les personnages appartiennent au ciel, à la terre, à l'enfer ou à la pure fantaisie du poète. Si M. Massenet a voulu mettre du mysticisme musical dans les légendes de Marie-Magdeleine et de la Vierge, il a tout à fait manqué son but; car on lui a généralement attribué l'intention de traiter des sujets légendaires ou bibliques au point de vue purement humain; il en a fait autant dans Eve. Dans le finale de Marie-Magdeleine, le Christ ressuscité apparaît à Méryem, qui en est «extasiée» et saisie d'une «ivresse infinie.» La Vierge se termine par l'extase et l'Assomption de la mère du Sauveur. Il n'est pas difficile de voir que dans ces deux morceaux on pourrait, sans faire aucun tort 134 à la musique, remplacer les paroles par d'autres, étrangères à la religion, au mysticisme et au surnaturalisme. Je ne sais si, dans le chant de la Sulamite d'Hérodiade, M. Massenet a voulu faire du mysticisme; en tout cas, il n'a pas fait une véritable chanson d'amour; de quelque manière que j'envisage sa musique, elle me paraît absurde. Je pourrais aussi trouver une trace de mysticisme dans les paroles du monologue de Jean-Baptiste, au dernier acte du même opéra, mais la musique de M. Massenet me ferait trop beau jeu. Dans le manuscrit du Prophète, Meyerbeer avait mis l'indication «avec ironie» dans le finale du quatrième acte, à l'endroit où le chœur chante:

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  • A quoi cela sert ? Je me le demande parfois. Politique, économique, social... tout cela fait la misère du monde. C'est pour cela que je souhaite me changer les idées par l'écriture, ce blog.
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